Carte des illuminations nocturnes |
Elle vient compléter la trame verte et bleue. La lutte contre la pollution lumineuse constitue aujourd’hui une obligation légale. L'arrêté ministériel relatif à la prévention, la réduction et la limitation des nuisances lumineuses date du 27 décembre 2018. Il s'applique sur la majorité des nouveaux projets d'éclairage depuis le 1er janvier 2020.
On estime à 2 % l'augmentation de la lumière tous les ans sur l'ensemble du globe. Le sujet est donc planétaire.
La 14ème édition "le jour de la nuit" s’inscrit dans le cadre, en France, de la Fête de la Science et du thème "le réveil du climat".
Cinq questions posées à Samuel Busson chargé d'étude biodiversité au CEREMA.
Quelles espèces sont le plus impactées par la pollution lumineuse sur les communes de la montagne Sainte-Victoire ?
S.B. <...Dans tous les cas, l’éclairage artificiel induit des désordres dans les écosystèmes et doit à ce titre être considéré comme un facteur altérant la naturalité d’un site ou d’un écosystème...
Toutes les espèces sont susceptibles d'être touchées et en particulier les espèces vivant dans et à proximité des cours d'eau...>
Quelles mesures faudrait-il prendre en priorité ?
S.B. <...L'arrêté de 2018 interdit l'éclairage direct des surfaces en eau, sauf motifs de sécurité Il serait souhaitable d’établir des zonages par besoins en éclairage, à croiser avec les enjeux locaux, par exemple en éclairant moins les zones périurbaines et rurales que les centres-villes.
Il y a d’autres solutions pour limiter la pollution lumineuse. Par exemple en installant des détecteurs de présence, des boîtiers de programmation ou plus simplement en réduisant la puissance lumineuse...>
Quelles conclusions pouvez-vous tirer des suivis déjà réalisés ?
S.B. <...L'extinction de l'éclairage en cours de nuit a des conséquences immédiates et faciles à évaluer sur la consommation énergétique ; faute d'un nombre de suivis scientifiques suffisants, il est cependant délicat, dans l'état actuel des connaissances, de conclure sur les bénéfices éventuels de cette pratique pour la biodiversité. Ces bénéfices peuvent par ailleurs varier. Type de lampe utilisée, température de couleur de l'éclairage, voire stade de développement et/ou sexe des animaux considérés sont quelques critères à prendre en compte. On remarque cependant que de nombreuses espèces sont surtout actives à l'aube et au crépuscule, au moment des "chronotones", concept proposé par Romain Sordello de l’UMS Patrinat.
Les chronotones sont les moments charnières entre le jour et la nuit. Ils sont déterminants sur les chiroptères qui chassent en début et en fin de nuit ainsi que de nombreuses autres espèces. Ces périodes correspondent aux heures où les besoins en éclairage artificiel des humains sont les plus importants, ce qui semble de fait limiter l'intérêt des extinctions en cœur de nuit...>
photo Samuel Busson
Quels sont les impacts de la pollution lumineuse sur la faune diurne et nocture ?
S.B. <...Les espèces lucifuges, qui fuient la lumière, perçoivent les alignements de points lumineux comme une véritable barrière lumineuse infranchissable. L'éclairage artificiel nocturne, public comme privé, peut par conséquent nuire considérablement aux corridors biologiques et au maintien de la biodiversité... De très nombreuses espèces d'oiseaux établissent leurs migrations de nuit pour des conditions aérologique stables. Les lumières artificielles froides à dominante bleue ont un effet également sur la sécrétion de mélatonine. C’est l’hormone du sommeil. Il est donc difficile, y compris pour le genre humain, de s’endormir à proximité de ces lumières...>
La mydriase est la dilatation de la pupille. Elle contribue à l’éblouissement si l’on observe directement les 24 points luminescents d’un candélabre LED. L’éclairage public de rue "standard" se situe vers 15 lux, mais on trouve parfois des installations surdimensionnées produisant plusieurs dizaines de lux au sol. La luminosité de la pleine lune est de 0.01 à 0.05 lux.
Quelles conséquences sur la flore ?
S.B <...Les arbres sont impactés par la pollution lumineuse. Ils vont débourrer, c’est-à-dire se mettre en bourgeon beaucoup plus tôt et perdre leurs feuilles beaucoup plus tard. Cette modification du cycle annuel peut exposer plus fortement ces arbres à des parasites et maladies car les individus sont plus fragiles. Les pollinisateurs sont également impactés. Ils officient majoritairement de nuit. Il a été constaté une baisse significative de production du rendement agricole (-13%) d'une espèce étudiée, le Cirse maraîcher dans des champs éclairés, en comparaison de champs non éclairés. Il existe une carte nationale des pollutions en lumineuse réalisée par Observatoire national de la biodiversité...>
Depuis 2013 il est interdit de laisser allumer les enseignes publicitaires de 1h à 6h du matin sur la majorité du territoire national.
Depuis 2018 il est interdit d'éclairer directement les cours d'eau et leur surface.
Le 1er janvier 2025 il sera obligatoire de remplacer les globes lumineux dont plus de 50% du flux est orienté vers le ciel..."
Photo Marc-Antoine Chavanis |
Hélas dans le domaine des énergies renouvelables, les éoliennes sont équipées chacune de deux flashs LED rouge et blanc d'une puissance de 20 000 candelas chacune, soit 140 fois la luminosité d'un écran de téléphone portable. L'illumination répond aux impératifs de l'aviation civile, tout en ne respectant pas l'esprit des directives du Grenelle de l'environnement. Il est probable qu'elle provoque un effet "vacuum" mais actuellement aucune étude n'a été réalisée sur ce sujet précis.
Aujourd'hui il n'y a pas de déploiement national de trame noire, mais des démarches volontaires locales. La démarche nationale est plutôt à ce stade de lutter contre les nuisances lumineuses de manière générale.
L'association pour Sainte-Victoire est très favorable à l’élargissement des initiatives des communes pour la diminution de la pollution lumineuse. L'ASV souhaite recevoir les observations de ses membres dans les sites expérimentaux.
Marc-Antoine Chavanis
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