Plusieurs associations (dont la LPO) nous informent d'une
manifestation contre le projet de centrale à bois de Gardanne, le 5 février
2017 à 10h30 (marche depuis la Mairie de Gardanne sur la centrale
biomasse). Cette centrale est actuellement en cours de test, comme on peut le
constater avec un petit panache de vapeur sur la tour de refroidissement
arrêtée en 2013. Pour beaucoup, c'est un projet faussement écologique : taille
trop importante (850 000 tonnes de bois par an, 150 MW) alors que la ressource
bois est dispersée, taux de rendement médiocre (32%) à cause de l'absence de
cogénération (pas de réutilisation de la chaleur par du chauffage urbain ou des
serres agricoles), pollution importante (particules fines, dioxine, oxyde
d’azote, monoxyde et dioxyde de carbone).
En outre, si dans un premier temps la centrale sera
alimentée en grande partie grâce à l'importation de bois depuis le Canada ou
l'Afrique du sud (ce qui n'améliore pas le bilan énergétique…), il est prévu
que, dès que possible, la ressource provienne d'un rayon de 400 km autour de
Gardanne -suivez mon regard…
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Les cheminées de Gardanne © Georges Flayols |
Autre aspect discutable, le faible taux de rendement
n'aurait théoriquement pas dû permettre l’attribution de subventions publiques
(admises à partir de 60 % d’efficacité énergétique), mais une dérogation a été
accordée à la centrale biomasse de Gardanne pour la rendre éligible à la CSPE
(Contribution du Service Public de l’Electricité). C'est donc en partie le
consommateur qui financera cette centrale en payant plus cher l’électricité sur
sa facture (70 millions d'euros versés par an pendant 20 ans, exonérés de
taxes). Petite cerise sur le gâteau, le Canal de Provence a installé un système
d'arrosage pour que les bois stockés ne brûlent pas en période de sécheresse…
Du côté des défenseurs du projet, le Centre Régional de la
Propriété Forestière (CRPF) estime que le projet est plutôt une chance pour une
forêt provençale peu rentable et que le prélèvement des quantités nécessitées
par la centrale est faisable sans procéder à des coupes à blanc.
Après un débat animé, le CA de l'ASV a considéré que ce
projet pouvait concerner Sainte-Victoire et a donc décidé de relayer
l'information sur la manifestation du 5 février :
- Certes, dans le massif, la gestion de la forêt est
relativement bien contrôlée; les prélèvements effectués ne sont pas intensifs
(par exemple, 25% seulement de la croissance naturelle des arbres pour
l'opération de débardage en cours autour de Roques Hautes, dixit le Grand
Site cf. photo ci-contre);
- Mais la destination du bois est l'approvisionnement
des chaufferies locales et la production de pâte à papier; il sera donc
nécessaire d'être vigilant sur l'intensité de l'exploitation (nous ne remettons
pas en cause le fait qu'il soit souvent nécessaire d'éclaircir les pins pour
diminuer le risque d'incendie et favoriser la croissance d'autres espèces);
- Autre lien, la cheminée et les tours de Gardanne se voient
facilement dès que l'on s'élève dans Ste-Victoire; c'est probablement l'élément
visuel le plus prégnant au sud (plus que les zones d'activité de Rousset ou
Trets ou que le champ photovoltaïque de Puyloubier);
- Enfin, la pollution ignore bien sûr les frontières et les
mesures de l'agence AirPACA montrent que notre région
n'est pas épargnée par certaines pollutions (ozone, pesticides, particules), y
compris à distance de l'Etang de Berre, de Marseille ou d'Aix.
On peut cependant regretter que les opposants au projet ne
définissent pas très clairement leur objectif : arrêter ou limiter le projet ?
interdire l’approvisionnement lointain (mais cela implique plus de coupes dans
le midi) ? créer un nouvelle ressource (par ex. eucalyptus à croissance rapide
sur les lits morts de Durance) ? imposer des filtres à particules fines ?
monter un projet de cogénération avec des utilisateurs locaux de chaleur ?
mettre en place des campagnes de mesure ? faire un bilan écologique complet de
tout le système impliqué par la centrale biomasse ? tenter d’associer les élus
(pour le moment, favorables en général au projet) à une remise en cause des
choix ?
Chacun jugera, au vu de ces éléments, de sa position. Outre
la manifestation du 5 février, une pétition circule actuellement sur ce dossier.
La leçon vaut également pour d'autres projets futurs. Pour Gardanne, le coup
est parti, sans grande inflexion évidente possible à l'horizon. Comment être plus efficace face aux
grosses machines politico-économico-administratives qui n’entendent guère le
point de vue des associations ?
(B. de Saint-Laurent, avec des éléments transmis par Michèle
Lautier, Marc Lassalle, Anne Renès)